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Zou ! Le blog d'isabelle Collombat
14 janvier 2010

D comme Désastre

IMG_0417comme Désastre.

Ce qui se passe à Haïti résonne dans nos têtes, nous frappe, nous touche, nous choque.

L'île damnée,

Le peuple anéanti,

La catastrophe démesurée.

Est-ce ça, la fatalité ?

Je voudrais, pourtant, ce matin, ne pas me laisser submerger par la vague de l'émotion qui nous emporte tous à travers la télé, la radio, Internet. Je voudrais prendre mes distances, garder la tête froide, les yeux secs tout en regardant la réalité en face. Penser aux enfants de Port-au-Prince, cette ville où chaque année des couples sans petits viennent de France et d'ailleurs adopter un enfant, parfois même des fratries entières. Penser aux parents qui portent dans leurs bras des corps miniatures qui ne respirent plus. Penser à ceux qui, coincés entre les murs, veulent vivre encore, vivre, et qui attendent des secours sur cette île où les secours n'existent pas. Penser à ceux qui errent, qui courent entre les cadavres et les ruines, devenus fous d'être encore en vie. Penser à ceux qui sont loin, séparés, dans l'attente, qui résistent pour ne pas se laisser aspirer par le vide.

Difficulté, défouloir, déroute, déraisonnable, dérangeant, démolir, divin, diable, démon, doute, durable, digérer, délirant, dru.

d_sastre_rougecomme Déjà, les appels aux Dons arrivent de partout.

Solidarité avec Haïti. La corde est sensible. Je sors mon chéquier. Qui n'aurait pas envie de donner pour ceux que tout accable ? Et, pourtant, je me retiens encore, à cause de ce déluge d'émotions. C'est toujours le même réflexe. La catastrophe du siècle et les carnets de chèque. Est-ce vraiment ça donner ? Ouvrir son carnet de chèque ? Est-ce que si je ne le fais pas, je suis un monstre ?

Je crains le syndrome du tsunami, l'afflux d'argent, indécent, le gâchis... et après ? Les touristes continuent de se presser sur les plages de Thaïlande défigurées par les industries du tourisme et de la crevette bon marché dont nous nous gavons, à Noël, en semaine, tout le temps.

D comme Déforestation.C'est un sujet sur lequel je travaille depuis quelques mois. 225Dans mes recherches, j'ai découvert YELE. Cette fondation créé par l'ancien chanteur des Fugges, Wyclef Jean, pour aider son pays, a mis en place "l'école verte" qui sensibilise les enfants à la protection des forêts. Haïti a perdu ses arbres depuis longtemps. Ceux qui restent servent aux plus pauvres. Ils leur permettent de se nourrir et de se chauffer. Sur le site de Yélé, aujourd'hui, Wyclef appelle aux dons. Un SMS, 5 dollars. 5 dollars.

D comme Durée. Si nous pouvions faire quelque chose qui change le cours des choses durablement à Haïti ?

Changer le cours des choses, c'est ce que la photographe Jane Evelyn Atwood, auteur d'un livre sur Haïti aux éditions Actes Sud, que j'ai entendu à la radio, imaginait, au début, quand elle a commencé à faire des clichés.

D comme Document. Jane Evelyn Atwood sait aujourd'hui que les photos, les témoignages et tous les livres ne changent rien, mais qu'il faut les faire, qu'il faut continuer à produire ce genre de documents.

D comme Dollars, les Américains en font des tonnes, paraît-il, pour Haïti. Les stars lancent des SOS pour la petite île, pour voir arriver les dollars. Dollar, la Douleur du Dollar, de Zoé Valdes. Pas si loin d'Haïti, à Cuba, très beau livre.

D comme Dictature, Duvallier, Domination. Haïti victime de certains hommes qui l'ont colonisée, exploitée, malmenée, détruite, ravagée, déforestée. Haïti, démolie par les puissances occidentales. Car, il ne faut pas se tromper, Haïti, ce n'est pas seulement la terre des catastrophes naturelles, des cyclones, des ouragans. Si les conséquences des catastrophes naturelles sont si terribles en Haïti, c'est que cette terre a été particulièrement abîmée par ceux qui l'ont pillée. Proie de tous les saccages. Haïti, terre de misère, mais d'abord provoquée par les hommes.

D comme Dany Laferrière, écrivain québécois d'origine haïtienne, prix Médicis 2009, que je veux découvrir cette année. Il est à Haïti en ce moment à l'occasion du Festival "Etonnants voyageurs" qui devait s'y dérouler ces jours-ci. Vivant comme d'autres écrivains qui ont donné de leurs nouvelles. Dany Laferrière aurait dit ces mots que le site du Nouvel Obs rapporte :

« Quand tout tombe, il reste la culture. Et la culture, c'est la seule chose que Haïti a produite. Ça va rester. Ce n'est pas une catastrophe qui va empêcher Haïti d'avancer sur le chemin de la culture. Et ce qui sauve cette ville, c'est le peuple. C'est lui qui fait la vie dans la rue, qui crée cette vie. Il ne faut pas se laisser submerger par l'événement.»

D comme Destin, le destin de deux frères que raconte Raoul Peck, réalista que le site du nouvel Obs rapportents eur haïtien, ancien ministre de la culture de son pays, dans son film sur le génocide rwandais, Quelques jours en Avril. Accablé, ce matin, à la radio, alors qu'hier, il est devenu le directeur de la FEMIS, prestigieuse école française de cinéma.

dominocomme Douceur. Quelle douceur apporter aux Haïtiens ? Je ne sais pas. Eviter l'indifférence dans quelques semaines, puis l'oubli dans quelques mois. Ne pas répondre aux sirènes de l'émotion jetable, mais regarder les choses telles qu'elles sont... et voter pour des responsables politiques porteur d'un vrai projet pour le Monde. Pourvu qu'il en existe.

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