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Zou ! Le blog d'isabelle Collombat
5 février 2014

Procès historique

Depuis hier à Paris, se tient un procès que les médias qualifient d'historique : celui d'un Rwandais Pascal SIMBIKANGWAaccusé de complicité de génocide et complicité de crimes contre l'humanité commis entre avril et juillet 1994. Une première judiciaire en France. Le procès est d'ailleurs, fait exceptionnel, filmé.

La Justice française a, donc, mis vingt ans pour s'atteler au travail. Il y a déjà eu des procès dans d'autres pays : en Suisse, en Finlande, aux Etats-Unis ou en Belgique. Mais jamais en France, fidèle soutien du gouvernement génocidaire puis terre d'asile, après la défaite, des responsables rwandais. D'autres procès de Rwandais sont attendus dans les prochains mois en France : au fil du temps, notre pays ne pourra pas s'éxonérer d'un examen de conscience.

L'implication de la France dans le génocide des Tutsi et des Hutu modérés est un sujet qui me tient à coeur. Il est en question dans dans mon roman "Bienvenue à Goma" inspiré des quelques semaines que j'ai passées en août 1994 au Zaïre, à la frontière rwandaise. "Bienvenue à Goma" commence d'ailleurs en évocant le rôle de la Justice  :

Bienvenue à Goma

Été 2006. On dit peu de choses à la radio, ce 3 juillet 2006, de la nouvelle. Pourtant, la cour d'appel de Paris vient de rendre une décision essentielle, fondamentale.

Les magistrats de cette juridiction ont confirmé que le travail mené au Rwanda dix mois plus tôt par la juge d'instruction était valable, qu'elle avait respecté les lois et les procédures en allant recueillir les plaintes de six rescapés rwandais dans leur pays. Bien sûr, on est encore loin du procès. Au moins ces six hommes et femmes qui, début 2005, ont déposé plainte contre X devant le tribunal aux armées de Paris pour complicité de crime contre l'humanité et/ou complicité de génocide sont-ils, pour le moment, assurés que la Justice continue d'enquêter, et c'est déjà énorme.
La télé se tait aussi et il n'y a presque rien dans les journaux. Les médias qui abordent vraiment le sujet se comptent sur une main. Moins qu'une main. Le Monde, Libération, Radio France Internationale. C'est à peu près tout.
On respire, on souffle, on reprend de l'air.
Encore que, dans ce «on», c'est surtout la Justice qui respire, qui souffle, qui reprend de l'air.
Je n'oublie pas les millions de morts, les paquets de victimes, les survivants et toutes leurs familles, et tous leurs proches.
Mais la Justice quand même, les joues rouges, essoufflée, honteuse, mal à l'aise, qui aspire à dire le droit, rien que le droit, et qui saute à cloche-pied, à cause de tous les bâtons qu'on lui jette dans les pattes, la Justice peut continuer son travail. Ce n'est pas rien, ça ne suffit pas, mais c'est déjà ça d'avoir le droit de chercher à savoir.
- Je suis fier de toi, souffle Seán, mon mari, dans le téléphone. Tout ça, c'est grâce à ton cabinet d'avocats, à ton patron qui t'a écoutée, à vos efforts, aux tiens, surtout, depuis toutes ces années.
La bataille a été longue, âpre. Elle est loin d'être finie, et encore moins gagnée. Le sera-t-elle jamais ?
La Justice est autorisée à instruire les plaintes des clients du cabinet pour lequel je suis employée depuis huit ans déjà. J'y suis entrée, à l'époque, juste pour ce combat-là, et d'autres sont venus s'agréger depuis.
Six rescapés rwandais.
Six, ils ont entre vingt-cinq et quarante-neuf ans."

Pour en savoir plus :

- à écouter l'interview d'Alain et Daphroza Gauthier sur France Inter :

- à lire l'article paru dans l'Humanité : ICI 

- à lire l'article de l'historien JP Chrétien : ICI

Pour suivre le procès, aller ICI

 

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