Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Zou ! Le blog d'isabelle Collombat
19 novembre 2009

Kriss la vie !

La présentatrice du journal de 13 heures a pris tant de gants pour l’annoncer que mon cœur s’est mis au ralenti tout à coup, frissonnant à l’abri.

Kriss est morte.

61 ans,

un cancer

et sa voix qui ne s’éteint pas au fond des tympans.

Pour les auditeurs de France Inter comme moi, Kriss n’était pas une inconnue.

Je n’ai jamais su à quoi elle ressemblait, j’ai toujours préféré l’imaginer. IMG_0365

Elle faisait partie de ma vie depuis l’enfance. Sa mort est un bouleversement.

Elle était cette voix impertinente, vibrante, curieuse, séduisante.

Elle était aussi une écriture gourmande, joyeuse, sensible.

Elle était un rire cristallin, coquin, décalé.

Elle était un regard porté sur les autres, sur le monde immense.

J’ai grandi à l’écoute de la radio.

Une radio (et évidemment pas n'importe laquelle), pour moi, c’est comme un bouquet de fleurs, c’est frais, parfumé, coloré, pétillant.

Une vie sans radio est terne et insipide. Je suis du genre radiomaniaque.

La radio rend la vie si vaste : elle nous empêche de tourner en rond dans nos caboches, elle nous interdit de ressasser, de faire macérer ce qui cloche, elle nous oblige à prendre nos distances avec ce qui souffre en nous, elle nous hisse vers l'universel. C'est sans doute parce que la radio nous rapproche des autres humains que la mort de Kriss me touche, me déroute.

En ce mois de novembre, on meurt décidemment beaucoup.

A côté de chez moi, les avis de décès sur la vitrine des Pompes funèbres me rassurent pourtant.

On enterre souvent des centenaires et quand c’est à 102 ans, je me dis que la mort est une fête.

Il faut danser, crier, manger, jouer, embrasser.

Sauf qu'en ce moment, il me semble qu'on meurt malgré tout beaucoup trop tôt.

Alors, on encaisse, nos squelettes secoués vibrent, mais à l’extérieur, on n’en laisse rien paraître.

Il faudrait trouver un sens à tout ça.

La vérité, c’est qu’il n’y en a pas.

La seule urgence, c’est de vivre, chaque seconde… refuser l’engloutissement, l’enfouissement, la désespérance.

Fermer les yeux et entendre la voix de Kriss.

Déjà, l’eau monte à la bouche, envie d’un dimanche derrière la radio à dévorer un crumbble.

Aux pommes, aux poires. Avec de la poudre d'amande, du beurre bio, de la cassonnade.

Faire crisser le plat et crisser soi-même de plaisir.

On reprend vie.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité