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Zou ! Le blog d'isabelle Collombat
25 mai 2015

Cinéma, source d'inspiration

Je rentre d'un court séjour à Cannes. 48 heures sur place et quasiment tout mon temps passé dans les salles obscures. Un bonheur. J'ai eu la chance de ne voir que des très beaux films. Un peu compliqué pour moi d'établir des palmarès. J'ai aimé en tout cas m'immerger dans des histoires qui parlent du monde d'aujourd'hui. Je me nourris toutes ces images, de tous ces visages, de tous ces paysages.

La tierra y la sombra, magnifique premier film que celui du colombien César Augusto Acevedo, lauréat de la Caméra d'or qui distingue une première oeuvre. L'histoire d'un homme qui revient au pays au chevet de son fils mourant et découvre ce qu'est devenue sa maison cernée par les plantations de cannes à sucre, sa terre sans fermes ni arbres devenue le bien d'un propriétaire invisible qui délègue son autorité de possédant à des contremaîtres dociles et inflexibles. J'ai été bouleversée par ce film. Il parle, à travers l'histoire d'un couple et d'une famille, de ce qu'est la réalité d'un monde où les plus puissants s'échinent à détruire la nature et à exploiter d'autres humains pour s'enrichir toujours plus. "Je dédie ce prix à tous les paysans de mon pays qui sont de véritables héros et je veux leur dire qu'ils ne sont pas seuls", a déclaré le réalisateur en recevant sa récompense. Le film avait déjà décroché deux pris à la Semaine de la Critique : le prix Révélation France 4 et le prix SACD. Ce film qui m'a fait évidemment pensé à d'autres paysans, à ceux du Brésil, et parmi eux à Chico Mendes à qui j'ai consacré un livre chez Actes Sud Junior dans la collection "Ceux qui ont dit non".

Dans ce film, j'ai également touchée par toutes les relations que dépeint César Augusto Acevedo : celles d'un homme et d'une femme qui se retrouvent, après une longue séparation, pour s'occuper de leur fils très malade; celles d'une femme et d'un fils qui, plutôt que de guérir, choisit de ne pas abandonner sa mère que son père a quittée, celle d'un homme et d'un enfant qui se découvre un grand-père, celle d'une femme qui, toute sa vie, se bat pour garder et défendre sa maison...

Chaque plan est juste et nécessaire, d'une beauté infinie et bouleversante.

Bande-annonce : La Tierra y la Sombra - VOST

Avec Paulina, film franco-argentin et brésilien, Grand prix de la Semaine de la critique, Santiago Mitre raconte l'itinéraire d'une jeune femme qui a des convictions et des valeurs fortes et qui se bat pour maintenir le cap qu'elle a choisi pour sa vie. Elle s'obstine à donner un sens à son travail, à son existence malgré les obstacles terribles qui voudraient l'empêcher de poursuivre. Dolores Fonzi, l'actrice qui incarne Paulina est absolument formidable.

Trailer PAULINA dir Santiago Mitre (Sous-titres fr.)

Mustang, le premier long métrage de la réalisatrice franco-turque Deniz Gamze Ergüven, m'a emmenée sur un autre continent, dans un autre pays, la Turquie avec cinq soeurs, adolescentes et pré adolescentes, cinq orphelines élevées par leur grand-mère à mille kilomètres d'Istanbul, dans une campagne de bord de mer. Parce qu'elles ont joué avec des garçons à la sortie de l'école, elles se retrouvent enfermées dans la maison familiale. Il faut absolument éviter le scandale, sauver l'honneur. Et peu à peu, la maison se transforme en lieu d'enfermement, en espace de rééducation pour faire de ces filles de futures épouses. Ce que j'ai aimé dans ce film, c'est l'énergie et la joie de ces filles qui tentent de refuser par tous les moyens cette privation de leurs liberté. Mais ce qui m'a plu davantage encore, c'est le regard de la réalisatrice sur ses personnages nous amenant, nous spectateurs, tour à tour, à éclater de rire, à écarquiller les yeux de surprise, à nous figer, frappés d'effroi avant de fondre en larmes, touchés parce que l'espoir est juste là, au bout de la route. 

Bande-annonce : Mustang - VOST

 

La vie en grand, film français de Mathieu Vadepied, raconte l'itinéraire d'Adama, jeune collégien dans un quartier de tours, cernées par le béton mais aussi par les champs et les bois. Adama balance entre l'envie de faire plaisir à sa mère pour qui l'école est plus important que tout et son désir de lui rendre l'existence plus facile, elle qui doit accepter de travailler la nuit à Rungis pour gagner sa vie. Adama se retrouve jeune dealer de drogue, obligé même quand il ne le veut plus, d'aller écouler la marchandise que l'oblige à vendre le caïd du secteur. Parce qu'Adama est un roi de l'improvisation, il fait illusion, il réussit à faire croire à ses enseignants qu'il a décidé de s'en sortir par l'école.

J'ai passé un très bon moment. Les deux garçons du film sont formidables. J'ai apprécié aussi les personnages de profs. Le prof de sport qui fait prendre conscience aux enfants de leur corps, de leur souffle. La prof de français qui encourage et qui partage des idées et sa passion pour la poésie. Certains diront que ce film ne correspond pas à la réalité, que les enseignants y sont beaucoup moins engagés, moins investis que dans le film. Peu importe. Pour Mathieu Vadepied, ce film est avant tout un conte. Je sais, quant à moi, qu'il existe des profs qui n'ont pas jeté l'éponge et qui continuent d'y croire encore. Pour Adama, le collège est un refuge, une cabane, un abri, le lieu aussi où il se hisse pour grandir et s'épanouïr, un endroit qui élève. On peut ne pas l'oublier.

Interview Mathieu Vadepied (LA VIE EN GRAND - LEARN BY HEART)

J'ai vu d'autres films, des courts et des longs métrages. Et j'ai pris en deux jours une grande bouffée d'air frais.

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