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Zou ! Le blog d'isabelle Collombat
12 mars 2010

Les photos d'Anaïs au Rwanda

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Anaïs Ginoux n'a pas trente ans. Elle est aide-soignante dans sud de la France. Sa passion : faire des photos et voyager, le plus souvent en solitaire. Au mois de novembre dernier, elle a été au Rwanda et en a ramené des photos. Le Rwanda, un point commun entre elle et moi, est à l'origine de notre rencontre via le net. J'ai voulu en savoir plus sur Anaïs. Comment et pourquoi une jeune femme décide de partir pour ce pays marqué il y a 16 ans par le génocide des Tutsi ? Elle a eu la gentillesse de répondre à mes questions.

- Pourquoi avoir choisi le Rwanda ? bis_48

C’était un rêve. Beaucoup de personnes étaient intriguées : comment peut-on rêver d’aller au Rwanda ? Une amie d’enfance, Audrey, est restée là-bas de 2005 à 2008 pour travailler sur la défense des Droits de l’Homme. Je n’ai pas pu aller la voir durant cette période, alors que j’aurai vraiment aimé la suivre dans ses missions. J’étais occupée par la traversée de la Mauritanie et de l’Ethiopie en solitaire avec mon vélo. C’est en août 2009 que nous nous retrouvons en France et parlons du Rwanda. Ne pouvant m’accompagner, elle me donne une liste de contacts, dont une association à Gisenyi et m’aide à préparer ce voyage dans le pays des mille collines : sans vélo mais avec un appareil photo. Je voulais aller voir ce pays par moi-même. Je suis allée au Rwanda pour voir et rencontrer .

- Que faisiez-vous en 1994 ?

J’avais 12 ans. Je me souviens très bien des images du journal de 20 heures. Je ne comprenais pas. Mes parents ne me les expliquaient pas assez. Je n’ai pas le souvenir de mes professeurs nous parlant de ce sujet si grave à l’école. Ces images très douloureuses traduisant une violence extrême sont restées gravées dans ma mémoire.

- Y a-t-il un lien pour vous entre votre métier d’aide-soignante et la photographie ?

Oui. Le lien entre mes deux métiers, c’est la passion d’ apprendre à  découvrir l’ Autre et moi- même de ce fait. Je suis rassurée : je ne vais pas m’ennuyer.

bis_76- Que cherchez-vous à capter avec vos photos ?

Je cherche à capturer beaucoup de choses, cela dépend un peu de mon état et de là où je me trouve, du voyage. Dans les villes, j’aime surtout les gens cadrés dans un environnement particulier. Chez certaines personnes, j’aime porter mon regard sur des détails : leurs yeux, leurs pieds, leurs mains…leurs corps (enveloppe de l’âme)…et comme tous les photographes , je pense,  une belle lumière.

- Qu’est-ce qu’il est impossible de photographier ?

Cela est une question très intéressante. Je pense que je n’arrive pas à photographier une personne qui ne le désire pas, même si parfois, je photographie des inconnus dans la rue, je pense que j’ai des limites à ce niveau. Sinon, je pense qu’il n’y a rien d’impossible… à photographier.

- Qu’est-ce qui vous a touchée au Rwanda ?

Le courage des gens m’a beaucoup touché. En parlant avec eux, j’ai revu le sens des mots Dignité et Respect. Je pense à Grace, étudiante en droit, Grégoire et les membres de l’ADEPE, Madine… Il est difficile d’exprimer avec quelle force ces personnes m’ont bouleversée. C’est la manière dont elles parlent et de quoi elles parlent, la façon qu’elles ont de réagir face aux problèmes et leur positivisme, indubitablement lié à la tristesse immense habitant chacun.

- Que gardez-vous de votre voyage ? bis

De ce voyage, je garde des amis(es)! Mais aussi des photos, des découvertes en matière de développement, d’apiculture, de cuisine. Je garde en tête le sourire et la douceur de Madine, la joie de sa maman et le goût pour le progrès de toute l’équipe ADEPE (Association Action pour le Développement du Peuple). Je garde l’idée de la chance que j’ai d’avoir deux parents et des grands-parents. Et je garde tous les objets qui m’ont été offerts avec des mots magnifiques. En gros, je garde tout et je ne jette rien.

Anaïs Ginoux cherche à faire connaître ses photos. A bon entendeur, salut !

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Commentaires
G
Votre souci du partage d'expériences vécues, consécutives à la tragédie rwandaise de 1994, vous honore. Il me touche, me bouleverse à double titre.<br /> <br /> Il suscite surtout une lueur d'espoir. Il esquisse la promesse de témoignages concrets de rapprochement progressif entre la France et le Rwanda. Rapprochement et consolidation des relations d'Etat à Etat, mais plus encore de peuple à peuple.<br /> <br /> La démarche personnelle d'Anais, quinze ans après le génocide au pays des mille collines, démontre l'impact et la puissance des images captées dans l'enfance. Elles peuvent déterminer ensuite, de manière décisive, l'orientation des choix de l'adulte. Elles suscitent tout naturellement le besoin de partager des découvertes et des échanges d'impressions indélébiles que l'on a glanées dans cette aventure.<br /> <br /> Voilà qui rejoint le point de convergence et de complémentarité avec l'expérience vécue par Isabelle Collombat. Elle a su l'exprimer avec tact et talent dans "Bienvenue à Goma". Elle a choisi, de surcroît, d'adresser son témoignage aux adolescents. A la tranche d'âge où les impressions majeures demeurent indélébiles. Vous êtiez décidément prédestinées à vous rencontrer un jour, à conjuguer vos efforts et vos dons respectifs vers un objectif commun.<br /> <br /> Le fait que cette démarche vise à réveiller l'intérêt d'un nombre croissant de Francais aux conséquences du génocide des Tutsi au Rwanda, aux implications éventuelles de la France officielle dans cette tragédie, pour mieux réparer les dégâts d'un passé douloureux, me touchent personnellement, comme je l'évoquai plus haut.<br /> En ma double identité de citoyen francais, d'origine rwandaise. J'ai pu récupérer ma nationalité d'origine, juste après le génocide. Trente ans d'exclusion et d'exil, loin de la mère-patrie, cela ne s'oublie jamais.
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