L'amitié, ça commence comment ?
La semaine dernière, quand Nicolas Sarkozy a fait escale au Rwanda, j'ai pensé aux relations franco-allemandes. Je sais bien que ce n'est pas la même chose. Les histoires ne sont pas les mêmes. Elles n'ont même rien à voir. Bien sûr, je ne m'imaginais pas que notre président français allait prendre le président Paul Kagamé par la main et avancer avec lui comme François Mitterrand et Helmut Kohl, en 1984, lors de la 70ème commémoration de la bataille de Verdun.
Entre la France et le Rwanda, on n'en n'est pas encore là !
Il y a, certes, des gestes, des symboles comme le dit Gaétan Sebudandi dans le commentaire qu'il a fait à mon post précédent. L'interpellation de la veuve du président assassiné en 1994, Agathe Habyarimana, accueillie à Paris à bras grands ouverts il y a 16 ans et accusée par Kigali d'implication dans le génocide des Tutsis, est un de ces gestes.
Mais, à la grande différence du couple franco-allemand, l'histoire n'a pas encore été racontée entre les deux pays.
Ce ne sont pas les livres qui manquent : les témoignages, les enquêtes existent. Cependant, il faut une volonté de part et d'autre pour que les choses soient dites, même celles qui sont difficiles à digérer. Il faudra sans doute encore du temps avant que la France ose regarder la vérité en face. Il était sans doute "plus facile" pour les Américains, l'ONU et les Belges de présenter des excuses. L'implication de notre pays n'est pas comparable avec la responsabilité des autres pays. Nous avons été très loin dans le cynisme, dans le soutien aux extrémistes.
Il faudra aussi que le pouvoir rwandais actuel ait la volonté de dire ce qui s'est aussi passé au Rwanda, y compris dans les rangs du FPR, le Front patriotique rwandais.
Le dernier ouvrage en date sur le génocide est celui d'André Guichaoua, un expert de l'Afrique des Grands Lacs, qui vient de publier aux éditions de la Découverte un livre intitulé Rwanda de la guerre au génocide. Ce professeur à Paris a écrit ce gros livre d'abord pour les Rwandais. André Guichaoua était sur place au mois d'avril 1994, il y avait des amis, une vie. Il a accumulé énormément de documents. Beaucoup de ces documents lui ont été remis par des Rwandais.
C'est là sans doute que commence l'amitié entre les pays, quand des individus tentent de faire ce qui leur semble juste.